Vendredi 14 Janvier 2011
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Il a gagné 36 courses en 2010. Déjà 3 en 2011… Les observateurs avisés s’accordent à le désigner comme l’un des plus prometteurs de nos apprentis. Lui, à 18 ans, il ne demande qu’à apprendre, et il ne s’emballe surtout pas. Théo Bachelot revient sur son début de carrière…

Avez-vous un rapport avec la famille Bachelot, qui s’est spécialisée dans le trot ?

Aucun. Mon père est en poste à la mairie d’Ouistreham, où il s’occupe du département « sport », et ma mère, en revanche, travaille sur les hippodromes depuis 22 ans, en tant que guichetière. Néanmoins, Raphaël Delozier, le jockey, est un cousin…

C’est lui qui vous a mis, sinon le pied à l’étrier, tout au moins la « puce à l’oreille » ?

Non. Tout petit, j’accompagnais ma mère sur les champs-de-course, Cabourg, Caen, Deauville, et mon préféré, à l’époque, Clairefontaine. J’ai tout de suite été fasciné…

Par quoi ?

Par le spectacle, par l’ambiance qui régnait. Pour moi, devenir jockey me semblait extraordinaire, j’étais en admiration…

Le cousin a poussé à la roue ?

Pas du tout. Nous avons parlé de son métier, sans plus.

Vous avez tout de même choisi cette voie…

Mon père, qui a été Champion de France de canoë-kayak m’a inculqué le goût du sport et de l’effort, mieux, même, il m’a transmis le virus. Gamin, j’étais polyvalent, je jouais au foot, j’ai tâté, moi aussi, c’était inévitable, au canoë-kayak, et je m’y étais bien lancé, mais, dès que j’ai découvert l’équitation et les « galops », je n’ai pas mis longtemps à choisir…

Vous avez décidé d’entrer dans une école AFASEC ?

J’ai commencé par effectuer un stage dans une écurie. Tous les lycéens de 3ème doivent suivre un stage, dans une entreprise, quelle qu’elle soit, durant la période scolaire, histoire d’avoir une meilleure perception, sinon approche, du monde du travail… J’ai demandé à Monsieur Wattel, installé à Deauville, s’il voulait bien m’accepter pour cette période. Il a répondu par l’affirmative et, là, j’ai véritablement été conquis. A la rentrée suivante, j’étais au Moulin-à-Vent, à Gouvieux.

La « rupture » avec la Normandie s’est faite facilement ?

Elle n’a pas été trop pénible, d’autant que je pouvais souvent rejoindre ma famille, pour le week-end. Et puis, il faut savoir ce que l’on veut, et on ne peut tout avoir. Le confort de chez « papa-maman », les bonnes leçons du matin sur les pistes, travailler pour parvenir à exercer le métier que l’on a choisi, tout n’est pas toujours compatible…

Votre maître d’apprentissage ?

Comme tout s’était bien passé chez Stéphane Wattel, il a accepté de me reprendre à son service et s’est débrouillé, administrativement, pour que je sois dirigé chez lui. Je l’en remercie encore.

Avez-vous débuté rapidement ?

Le 14 septembre 2009, je n’avais pas encore 17 ans.

Et votre premier succès ?

Le 3 janvier 2010, à Deauville, pour mon patron, avec Principe Uromonte. Ce sera toujours un souvenir merveilleux…

D’autres belles victoires ?

Toutes, sont belles, et ce n’est pas qu’un cliché. Mais, début octobre, j’ai remporté la 1ère épreuve du week-end du Prix de l’Arc de Triomphe, avec Creyente, pour Mauricio Delcher-Sanchez. Ce n’était qu’un « réclamer », mais c’était dans un Longchamp en fête, avec la foule… D’ailleurs, mon patron a mis un bulletin, pour cette Creyente, et nous l’avons ramenée à la maison.

A-t-elle réussi, depuis ?

J’ai terminé deuxième d’une Course B, avec elle, puis, associée à Raphaël Marchelli, elle a conclu sixième d’un Groupe I…

Raphaël Marchelli monte beaucoup pour Stéphane Wattel…

Oui, et j’ai la chance de le côtoyer. Je tiens, à ce sujet, à souligner le superbe travail d’équipe qui est réalisé, à l’écurie. Sans les cavaliers d’entraînement, qui se donnent à fond tous les jours et qui m’apprennent beaucoup, nous n’aurions pas les mêmes résultats. Je dépends d’une bonne « maison », gérée par un bon patron, et où j’ai de bons « collègues ».

Donc, tout « roule »…

Oui, et j’en profite, pour l’instant, car je sais qu’il y a aussi les semaines de méforme, qui permettent parfois de mieux rebondir, cela dit, mais qui entretiennent le doute, et je m’attends à un coup de « moins à la mode », le jour où je perdrai ma décharge.

Aujourd’hui, vous êtes également demandé par d’autres professionnels…

Monsieur John Hammond, que j’apprécie beaucoup, car il a un peu le même profil que monsieur Wattel, et, principalement, les Deauvillais : Yann Barberot, au pourcentage de réussite exceptionnel, Philippe Van de Poële, Markus Nigge et Alexandre Fracas.

Votre patron ne voit-il pas cela d’un mauvais œil ?

Au contraire, je pense qu’il apprécie que l’apprenti qu’il est en train de former soit sollicité par l’extérieur.

Justement, les turfistes avertis voient en vous un futur grand… Qu’en pensez-vous ?

Je sais que l’on parle de moi dans le bon sens, mais, moi, je n’aime pas me « commenter ». J’apprends, je progresse, j’essaye de rester moi-même.

Toutefois, si vous avez une qualité, à cheval ?

Je pense être très patient. Je m’efforce, en tout cas, d’être le plus patient possible. J’adore prendre mon temps, bien équilibrer mon partenaire, rester calme, avec lui, le décontracter, l’empêcher de tirer. Remarquez, je suis d’une nature très patiente, et je ne me fais donc pas violence. J’aime me fondre dans la masse et venir « grappiller » quelque chose pour finir, alors qu’avant le coup, cela s’annonçait difficile. Un poulain qui vient conclure plaisamment, cinquième, après s’être bien géré, a une meilleure leçon que celui qui conclut au même rang, roué de coups, après avoir mené grand train… Et mon patron a, lui aussi, cette optique.

Un défaut ?

Le revers de la qualité : me montrer « trop » patient, particulièrement en province, où les épreuves ne se déroulent pas de la même façon. Lambiner à l’arrière, dans une belle action, certes, mais lambiner tout de même, peut vous jouer des tours…

Rencontrez-vous des problèmes de poids ?

Je peux me mettre en selle à 52,5 kilos, pour 1,66 mètre. Je dois faire attention, mais je me sens vraiment privilégié, par rapport à certains. Je ne mange pas beaucoup, sans me priver, je suis très « fruits et légumes ». Je m’interdis les écarts répétés, mais c’est tout. Une séance de sauna, de temps en temps, mais surtout pour le plaisir…

Comment cela ?

Se décrasser, évacuer les toxines, se vider, aussi, la tête. Dans la même lignée, je pratique le jogging, pour me remettre les idées en place. Quand je rentre, je suis « calmé ». La piscine, aussi, avec, épisodiquement, un peu de thalassothérapie. Le sport me plaît toujours autant, mais je l’adapte à ma profession. Je ne vais pas courir un marathon la veille de mon « derby »…

D’autres passions ?

Je n’ai pas beaucoup de loisirs… De temps en temps, un bon restau, ou une petite « virée », toujours dans Deauville, avec des amis, pour parler d’autre chose que des courses…

Célibataire ?

Oui. Je vis seul, à Trouville.

Lourd à porter ?

Non. Quand je monte régulièrement, le temps passe vite. Il y a eu une période, à l’automne, où c’était plus calme, et là, j’avoue que, par moments, j’aurais préféré qu’on soit deux…

Vous vous faîtes la cuisine ?

Je vous l’ai dit, je suis très fruits et légumes. J’achète ce dont j’ai besoin au jour le jour, je ne projette pas de me mitonner tel ou tel plat… C’est la jeunesse, aussi, sans doute, qui veut cela. Et, pour ne rien vous cacher, ma mère habite à Touques, tout près, alors, quand j’ai envie de me faire un peu « bichonner », je connais l’adresse… Et je saisis l’occasion pour la remercier, elle, mon père, ma famille, et tous ceux qui m’ont fait et me font confiance.