Vendredi 21 Janvier 2011
jose-bruno-gonzalez-sanchez

Son exploit du mardi 18 janvier à Pau est pratiquement passé inaperçu. Au commandement depuis le départ dans un steeple-chase cross country, en selle sur Néfertar, préparée par son patron, Fabien Lagarde, José-Bruno Gonzalez-Sanchez se retrouve en fâcheuse posture. L’un de ses étriers a cassé. Il reste à franchir le brook, le passage de route, et les trois derniers obstacles… Il y parvient, évitant d’extrême justesse la chute à l’ultime difficulté du parcours, rééquilibrant sa partenaire pour revenir s’imposer d’un…nez, aux dépens de la Cravache d’Or, David Cottin et Maurrinor. Coup de projecteur sur un « jockey de l’ombre »…

Quel âge avez-vous ?

35 ans.

D’après votre nom, vous êtes d’origine espagnole, non ?

J’ai la double nationalité. Je suis né en France, mais j’ai grandi dans un petit village, en Espagne.

Pourquoi les chevaux ?

Il y en avait beaucoup, dans les fermes avoisinantes. Je les ai toujours aimés.

Pas de famille dans le milieu ?

Non. Enfin, si. Un cousin éloigné, plus âgé que moi, était jockey. Mais j’ai même oublié son nom, si ce n’est Sanchez… quelque chose, car nous ne nous voyions pratiquement jamais.

Club hippique ?

Jamais.

Alors ?

J’étais encore petit quand mes parents, pour des raisons de santé, sont venus s’installer en France. Je suis allé à l’école et, à 14 ans, j’ai pu entrer à l’école AFASEC  de Mont-de-Marsan.

Saviez-vous monter à cheval ?

Disons que, chez nous, je savais « monter dessus ». Quand je suis arrivé à l’AFASEC, c’était la première fois de ma vie que je voyais une selle ou une bride… Au village, nous montions « à crû », avec un licol…

Qui a été votre maître d’apprentissage ?

Daniel Boutier. Je suis resté 5 ans, chez lui.

Vous faisait-il confiance ?

Oui. Mais je venais de commencer à participer à des courses plates quand je me suis cassé la jambe. Huit mois d’arrêt. A mon retour, moi qui pesais 49 kilos, j’en avais pris 10 supplémentaires et grandi de 20 centimètres… Cela devenait très difficile.

Alors ?

Alors, j’ai décidé de me tourner vers l’obstacle, et j’ai pu rejoindre l’équipe de Jacques Ortet. Une bonne école, c’est certain, et, d’ailleurs, grâce à lui, j’ai terminé une fois dans le « top dix », mais ça n’allait pas trop, nous avons même eu des mots…

Ensuite ?

J’ai bien failli arrêter. J’étais venu chez Jacques Ortet pour apprendre, mais j’étais encore jeune et je me suis dit que je n’étais peut-être pas fait pour ce métier. J’avais pris un coup au moral. Il était encore temps pour moi de changer d’orientation.

Pourquoi ne l’avez-vous pas fait ?

Difficile d’abandonner une passion. Et un ami, Alain-Georges Meynard m’a dirigé sur Pompadour, il y a une dizaine d’années. « P.J. » Paquet me donnait ma chance, j’ai décidé de tenter l’aventure. Et je ne le regrette pas…

Vous totalisez, ce 21 janvier 2011, 122 victoires. C’est bien ?

Pour un petit jockey de province, oui, ça me va. Je ne cherche pas la gloire, je sais très bien que je n’entrerai plus jamais dans le « top 10 » ou même « top 20 ». Mais je suis heureux comme cela, j’aime ce que je fais, je me plais chez Fabien Lagarde, un grand professionnel à qui je souhaite de s’agrandir encore, et au service de qui je suis depuis avril 2010.

Des objectifs ?

Continuer à me mettre en selle tant que ma santé me le permettra et, pour l’instant, je suis en pleine forme. Et l’objectif, c’est d’y rester. Je me fais plaisir, en compétition, et j’apprécie d’autant plus qu’il y a trois ans, j’ai connu un souci...

De quel ordre ?

Une tumeur au cerveau, qui m’a mis un an sur la touche.

Due à une chute ?

Non. Elle est venue « naturellement » et était, finalement, bénigne. Je n’ai donc aucune appréhension quand je me mets en selle.

A 35 ans, même si vous avez encore de belles saisons devant vous, avez-vous pensé à une reconversion ?

Pas du tout. Je vous l’ai dit, je me sens bien, je vais me marier en septembre, je ne demande qu’à bien faire mon boulot et signer quelques beaux gagnants. Les débuts n’ont pas été tout roses, je suis venu un peu sur le tard, mais chacun sa route.

Un confrère vous fait-il « bayer » ?

Comme nous tous, Christophe Pieux. Il est hors normes, les bons lui arrivent à la cheville. Le problème de l’étrier, l’autre jour, à Pau, lui, il le résout, avec succès, 9 fois sur 10. Moi, lorsque cela m’était déjà arrivé, précédemment, à Pompadour, j’étais tombé à l’oxer…

D’autres passions ?

J’adore le foot. D’ailleurs, je vais régulièrement, et participe, aux séances d’entraînement d’une petite équipe, proche de Pompadour.

Des matches ?

Non. Ils ont généralement lieu le dimanche et, le dimanche, il y a courses… Mais j’aime aller à l’entraînement, pour me maintenir en condition, bien sûr, mais aussi pour rencontrer des amis, parler un peu d’autre chose que des chevaux et du turf.

Et, à part le foot ?

Je vis comme tout le monde. Une petite sortie, de temps à autres, j’apprécie également les vacances, les voyages… Pratiquement toute ma famille habite en Espagne, alors, quand je le peux, j’y fais un saut, sans jeu de mots…

Pompadour, est-ce bien situé ?

Oui. Désormais, il ya de belles autoroutes qui mènent un peu partout, à Lyon, dans le Sud Ouest… Il ne faut pas avoir peur des kilomètres, c’est tout.

Vous avez l’air plutôt calme…

Il vaut mieux, dans cette profession, ne serait-ce qu’avec les chevaux. Et puis, ne pas faire de bruit, ce n’est pas mal…

Revenons sur Néfertar. Fier, le lendemain ?

Surtout mal aux adducteurs…