Jeudi 25 Septembre 2014
Ervan Chazelle

Être jockey free-lance, se relever de ses accidents, préparer l'avenir... sont autant de sujets que Jour de Galop a abordés avec Ervan Chazelle, jockey d'obstacle depuis quinze ans.

Quelles difficultés avez-vous rencontrées dans l'apprentissage de votre métier ?

Je suis rapidement tombé, le matin, et je me suis relevé avec l'envie d'y retourner. Je n'ai jamais trouvé cela difficile. C'est du travail, c'est sûr, et dès mon apprentissage à l'Afasec, c'est ce que mes professeurs m'ont appris. Mais, porté par la passion, je n'ai pas rencontré de grandes difficultés.

Le matin, chez Thierry Civel, je montais des chevaux qui sautaient bien et qui m'ont mis en confiance. Il m'a beaucoup fait monter, ce qui m'a permis de progresser.

Quelles sont les premières qualités d'un jockey selon vous ?

De bien ressentir son cheval, d'être à son écoute et puis évidemment d'avoir la science du train.

Vous avez ensuite intégré l'importante écurie de Guy cherel, quel enseignement en avez-vous retiré ?

Quand j'ai perdu ma décharge, Guy Cherel m'a contacté pour seconder Pascal Marsac. C'était une belle opportunité et après en avoir discuté avec Thierry Civel, j'ai décidé de travailler avec lui.
C'était un entraînement très différent. Il a fallu que je m'adapte, mais là-bas, j'ai pu compléter mon apprentissage en montant de jeunes chevaux à mécaniser et à former sur les obstacles. C'était très enrichissant. Fin 2007, j'ai décidé de devenir free-lance. Julien Phelippon, un ami, l'agent de Christophe Pieux à l'époque, m'avait dit que si je devenais free-lance, il m'aiderait. C'est ce qu'il a fait. Il m'a notamment mis en relation avec Robert Collet, avec lequel j'ai considérablement travaillé et appris en allant sauter les chevaux le matin. Désormais, je travaille beaucoup avec Tatiana Puitg qui s'occupe des chevaux de l'Écurie Victoria Dreams, ou pour Christian Scandella également.

Vous avez été victime de plusieurs accidents, certains vous laissant sur la touche pendant plusieurs mois. L'accident fait partie intégrante de votre métier, mais comment l'appréhendez-vous ?

À l'Afasec, je m'interdisais de devenir jockey d'obstacle. Je me disais qu'ils étaient fous ! Et puis j'ai goûté à l'obstacle et j'ai ressenti des sensations que je n'avais encore jamais eues. L'accident fait partie de mon métier, c'est comme ça, le risque est là, je le sais, mais je n'y pense pas à chaque fois que je me mets en selle.

J'ai fait de grosses chutes, on m'a enlevé la rate, j'ai eu une rupture des ligaments croisés... Ces chutes m'ont en effet laissé sur la touche durant plusieurs mois. Pendant ma convalescence, je n'avais qu'une envie : remonter le plus vite possible. Alors j'ai fait tout ce que je pouvais pour me remettre en selle, mais je crois qu'il est important de ne pas griller les étapes. Il faut revenir rapidement en piste, mais en pleine possession de ses moyens. 

LES DÉBUTS DE SA CARRIÈRE

Fils d'un passionné de courses, Ervan Chazelle nous a raconté : « J'ai connu les courses grâce à mon père qui est coordinateur et juge à l'arrivée dans le Centre-Est. C'est lui qui m'a emmené sur mes premiers hippodromes et j'ai tout de suite aimé ça. J'ai intégré l'Afasec quand j'ai eu l'âge d'y être admis et je suis entré en apprentissage chez Henri van de Poële. Après, avec ma morphologie, je me suis orienté vers l'obstacle et j'ai rejoint l'écurie de Thierry Civel pendant deux ans. »

En tant que free-lance, de quelles ressources viviez-vous pendant vos convalescences ?

La MSA [Mutualité sociale agricole, ndlr] nous reverse un salaire sur la base de nos gains perçus l'année précédente. Mais cela ne peut pas toujours suffire. Ainsi, quand on est free-lance, il faut penser à prendre une assurance complémentaire. Tous les jeunes ne pensent pas à le faire, mais c'est primordial en cas d'accident.

La reconversion des jockeys est un sujet fréquemment évoqué. Y pensez-vous parfois ?

Non pas encore. Mais il est vrai que la reconversion des jockeys est un sujet sur lequel il faut se pencher.
L'Association des jockeys travaille notamment dans ce sens en récoltant par exemple des dons. Je pense qu'il est important, au fur et à mesure de notre carrière, de rester ouvert aux autres et de continuer de découvrir d'autres choses afin d'avoir, le moment venu, un maximum de contacts et de connaissances.

Quel regard portez-vous sur la gestion générale de France Galop ?

Je trouve que notre système est plutôt bien géré. Je ne connais par exemple aucun problème de facture ou de retard de paiement... Tout est bien organisé. Cependant, il faut toujours essayer de faire mieux et les courses se renferment sur elles-mêmes, notamment vis à vis des sponsors.

Et sur la gestion du PMU ?

La multiplication des réunions est une bonne chose tant que nous ne tombons pas dans l'excès et aujourd'hui nous sommes, selon moi, dans l'excès. Les courses, les chevaux et ses acteurs, ne sont plus que des chiffres.La multiplication des réunions nuit au spectacle des courses. Alors certes, cela reverse beaucoup d'argent à la filière, mais il faut faire attention de ne pas tuer à terme notre sport en le réduisant à un simple jeu de hasard.

Que changeriez-vous en priorité dans les courses françaises ?

Il faut conquérir un public plus large et cela passe notamment par le sponsoring.

Dans quel pays aimeriez-vous monter à l'année ?

Je ne quitterai certainement jamais la France. Je m'y sens bien, le système fonctionne bien et j'ai ma petite famille maintenant ici, mais j'aimerais monter un jour en Angleterre.

Que peut-on vous souhaiter ?

De continuer ainsi. Je suis dans le top 20 tous les ans et j'en suis très heureux. J'espère avoir encore une bonne dizaine d'années devant moi. Ah oui, et on peut également me souhaiter d'éviter les accidents !  

 

Source : Jour de Galop